Ce terme, souvent employé avec une tonalité négative par les médias, peut être perçu, selon P.-E. Sutter, comme une bonne nouvelle. Non, ne vous offusquez pas ! Le président de la Maison des éco-anxieux – mais aussi dirigeant de mars-lab, psychothérapeute spécialisé en burn-out et éco-anxiété, enseignant, auteur et conférencier – ne se réjouit pas de l’angoisse d’autrui et n’est pas non plus un fan de scénarios apocalyptiques. Bien au contraire, il y voit une forme d’espérance pour les humains que nous sommes. « Ah oui, vraiment? » allez-vous me rétorquer. Et je vous répondrai « Minute papillon ! Poursuivez la lecture et vous comprendrez son point de vue ! ».

Illustration créé avec ©Canva

Signification

Avant d’aller plus loin, il est essentiel de résumer quelle est la définition de ce phénomène psychologique. Pour reprendre mot pour mot celle du Dr. Sutter : « L’éco-anxiété est un processus de prise de conscience aigüe des problématiques environnementales, actuelles et à venir[…] »

Un processus qui comprend :

  1. des inquiétudes pessimistes au sujet de notre avenir
  2. enjeux titanesques qui nous créent un « éco-stress » du fait que nous puissions nous sentir impuissants face à toutes les problématiques qui mettent en danger la pérennité de notre existence sur cette planète.
    • Un stress qui nous amènent à porter un package d’émotions négatives telles que :
      1. de la tristesse face à l’extinction de plus en plus d’espèces – animales ou végétales – ;
      2. de la colère à l’égard des pollueurs ou des climato-sceptiques invétérés ;
      3. du dégoût devant les actions insensées de notre société consumériste
  3. les valeurs de cette dernière qui se révèlent bourré de dissonances et qui créent un conflit interne et profond en nous au travers d’une crise de sens ;
  4. de multiples formes d’angoisses existentielles qui concernent (liste non-exhaustive) :
    • notre responsabilité (et la culpabilité qui peut l’accompagner en jugeant que nous n’en faisons pas assez)
    • la perte de sens au sujet de notre existence et l’absurdité perçue de celle-ci
    • un sentiment de vulnérabilité, ainsi qu’une peur de la mort et de la fin des temps
    • celui de la solitude, survenant quand, autour de soi, on nous donne l’impression de se sentir le/la seul/e concerné/e

Face à deux chemins

A un moment donné, l’éco-anxieux/se se trouve face à deux options, tandis qu’il/elle traverse la « vallée de la mort » (4ème étape de la courbe illustrée ci-dessous, qui totalise 11 étapes dans le processus vers la résolution de cette problématique), il/elle remonte progressivement la pente, favorise l’action et l’engagement et tend vers la concrétisation d’un « éco-projet » (11ème étape), ou alors il/elle s’enfonce dans la dépression. Et à partir de là, uniquement dans cette situation précise, on pourra dès lors considéré l’éco-anxiété ressentie comme maladif, car elle aura trop duré et aura atteint l’individu jusqu’au plus profond de lui-même. En-dehors de cette situation, ce phénomène stressant n’est pas considéré comme une maladie.

Courbe illustrée des 11 étapes du processus d'éco-anxiété

Fort heureusement, cette issue peut être prévenue et/ou traitée une fois submergé par la charge psychologique qu’elle fait peser en soi. Ceci en se faisant accompagné par un/e professionnel/le de santé, sensible aux problèmes environnementaux de préférence.

Distinction entre « information » et « prise de conscience »

L’auteur emploie ensuite quelques lignes pour nous parler de la différence qu’il y a entre « être informé » et « être conscient ». D’après lui, bien qu’elle englobe la sphère cognitive, la conscience est un état d’être qui surpasse celle-ci, mais également la sphère affective (celle des émotions) et la sphère noétique (celle du sens). Il donne un exemple très parlant dans le cadre du tabagisme.

Quoique les fumeurs/euses aient été maintes fois avertis/es des dangers encourus par des slogans tels que « Fumer tue », le savoir ne les empêche toutefois pas de continuer. Parce que la prise de conscience n’a pas encore eu lieu en son for intérieur, il/elle ne réalise pas réellement le danger qu’il/elle encourt. Et même en connaissant les données statistiques qui démontrent la probabilité toujours plus élevée de développer des cancers et de réduire son espérance de vie, les personnes concernées rationalisent en se disant – aussi fermement que possible bien entendu – qu’elles arrêteront bientôt ou qu’elles passeront entre les mailles du filet.

Pourtant, les dangers qui menacent respectivement la vie d’un fumeur ou d’une éco-anxieuse est du même ordre de gravité qu’il s’agisse de la toxicité du tabac ou du réchauffement climatique (pour ne citer que ça). Alors pourquoi réagissons-nous différemment ? Comment la prise de conscience peut-elle s’opérer, si c’est elle qui fait vraisemblablement toute la différence ?!

Toujours selon le Dr. Sutter, une information « entre dans le champ de conscience […], c’est-à-dire dans sa vision du monde, il faut qu’il y ait un lien […] un lien qui fasse sens au plus profond de lui-même. » Dans le cas exposé à titre d’exemple, l’individu réalise vraiment que fumer risque de le tuer dès lors que survient le décès d’une connaissance, d’un parent ou d’un ami à lui qui a contracté un cancer à un âge plus ou moins jeune. Partageant la même problématique avec le/la défunt/e, par conséquent, cet événement éveille en lui sa conscience des risques réelles qu’il encourt.

Il en va de même pour l’éco-anxiété. En effet, c’est la survenue de plus en plus fréquente de catastrophes climatiques – parfois extrêmes – qui contribue aux prises de conscience… et, inévitablement, à l’éco-anxiété (avec les fameuses réactions possibles, déjà évoquées plus haut, qui en découlent).

Photo portrait de Pierre-Eric SUTTER

Sources (sujet + 2ème illustration) : obveco.com | par Pierre-Eric SUTTER, avec le soutien de Loïc STEFFAN | art. du 4 décembre 2021 ; profil Linkedin ; psychotherapeute-pesutter.com ; photo portait : Pierre Eric Sutter – Psychologue.net


Si vous désirez approfondir le sujet, voici le lien d’un article du site belge : Éco-anxiété et solastalgie : c’est quoi ? | écoconso (ecoconso.be)

Ou celui-ci, rédigé sur ce site dédié à la finance suisse : L’éco-anxiété: le mal du siècle | Allnews

Ou encore, un court reportage du 19h30 de la RTS, diffusé le 27 juillet 2023.

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